VOL DE DROGUE AU QUAI DES ORFÈVRES (FEUILLETON EN x ÉPISODES) - ÉPISODE 3 : AUTOUR DU LAC DE CRÉTEIL

D.G. le frère du principal suspect, vient d'expliquer à la police les tribulations d'un sac rempli d'argent que son frère lui aurait demandé de cacher. Le capitaine de l'IPGN (Inspection Générale de la Police Nationale) lui pose alors une question apparemment anodine, qui va déclencher un nouveau rebondissement.

Lac de Créteil

D.G. vient d'expliquer qu'il vient de jeter le sac de billets, lesté de pierres, dans le lac de Créteil puis, plus tard, à la demande de son frère, qu'il est allé vérifier la présence d'un autre sac caché au pied d'un arbre et dont il a alors amélioré le camouflage.

Le policier lui demande alors : "Vous revoyez encore ce sac par la suite? " et D.G. lui répond que mi-décembre dernier, au parloir de Fleury, son frère, par peur des écoutes, inscrit de nouvelles instructions sur un morceau de papier. D.G. a pour mission de retrouver un inconnu prénommé Yoss devant le 142, boulevard du Montparnasse (source Journal du dimanche) :

 "Je devais tout récupérer et remettre le tout à ce type. Il devait être dans une Clio blanche et je devais me présenter à lui en tant que Marius." Sur les instructions données par Jonathan, D.G. se souvient aussi qu'il doit "discrètement" relever l'immatriculation de la Clio. À un chiffre près, il s'en souvient encore, et la livre aux policiers de l'IGPN. C'est ce détail qui va leur permettre de remonter la filière… À l'heure dite, le samedi 3 janvier, D.G. retrouve "Yoss", "35 ans, 1 m 85, corpulence mince, cheveux bruns courts", boulevard du Montparnasse. Les voilà en route pour le lac de Créteil. En chemin, ils avisent "un manche à balai dans une poubelle" qu'ils récupèrent pour sortir le sac à dos de l'eau. "Yoss a repéré trois ou quatre objets, mais le balai était trop court pour les atteindre." D.G. décide alors de plonger : "Je suis descendu à l'échelle, l'eau était glaciale… j'avais pied… je suis remonté sans avoir trouvé le sac à dos." Les deux hommes, "bredouilles", remontent dans la Clio et rejoignent cette fois-ci le buisson contenant l'autre sac caché au pied de l'arbre. Les 50.000 euros contenus à l'intérieur changent de mains. "Qui est ce Yoss par rapport à Jonathan?", questionne l'enquêteur. "Je n'en sais rien, je ne l'avais jamais vu", jure D.G. en fin d'audition. 

 Suite à ces aveux, D.G, Touati M. et Nicolas J. sont tous les trois mis en examen et incarcérés. Mais c'est en exploitant les informations concernant Yoss que l'enquête va s'accélérer. Grâce au signalement de sa voiture, les enquêteurs apprennent qu'il s'agit en fait de est en réalité Yossef I., un proche de l'escroc Christophe Rocancourt, écroué à Fleury-Mérogis depuis octobre, et à l'isolement comme J.G., le principal suspect.

Christophe Rocancourt est un escroc de haute volée bien connu des services de police en France et aux USA. Il a déjà une fructueuse carrière derrière lui. Né d'une mère prostituée et d'un père alcoolique, il est abandonné enfant à l'assistance publique. Il file aux USA où il va escroquer plusieurs stars (Michel Polnareff par exemple). Il finit en prison où il purge douze ans. Quand il revient en France en 2005 il publie une autobiographie "Moi, Christophe Rocancourt, orphelin, play-boy et taulard", vendu à 150 000 exemplaires.

Le quotidien Le Monde ajoute (référence) :

La dernière fois que Rocancourt est passé devant le juge, c’était en février 2012. Il est alors accusé d’avoir extorqué 700.000 euros à la cinéaste Catherine Breillat, très diminuée par un accident vasculaire cérébral. Son palmarès de petite frappe avait captivé l’artiste, qui voulait en faire le comédien principal de son film "Bad Love". L’apprenti acteur avait alors accueilli Catherine Breillat dans sa maison, où il vivait à l’époque avec l’ancienne miss France Sonia Rolland. Il sortait la réalisatrice au restaurant, lui coupait même sa viande. Et lui avait fait signer de beaux gros chèques. [...] Le tribunal le condamnera à huit mois ferme et près de 600.000 euros de dommages et intérêt pour "abus de faiblesse". 

Christophe Rocancourt, devait sortir de prison en février 2015 et était donc voisin de cellule de J.G à Fleury-Mérogis. Que se sont dit les deux hommes ? Se connaissaient-ils avant de se rencontrer en prison ? Rocancourt a-il proposé à J.G. de faire fructifier son magot ? Ces informations n'ont pas été rendues publiques.

Le Journal du dimanche ajoute :

Deux jours après ce parloir enregistré, Yoss est effectivement en garde à vue. Il confirmera en tous points le récit de D.G. et dit avoir récupéré l'argent "sur instruction, sans en connaître l'origine". Yoss déclare avoir remis 12.000 euros à Alexandra, la compagne de Rocancourt. À 300 euros près, la somme sera retrouvée en perquisition chez la jeune femme… Yoss a aussi caché 20.000 euros dans des bocaux dans le jardin de sa belle-mère et une autre partie chez lui et à son travail. Près de 50.000 euros en tout. Le jeune homme, mis en examen, évite l'incarcération. Difficile pour Rocancourt, qui, d'après son avocat Me Jérôme Boursican, serait hors de cause, de nier son implication. Les enquêteurs le soupçonnent d'avoir fait croire à son voisin de cellule à l'isolement, J.G., qu'il allait "placer" son magot.

Pour embrouiller le tout, il faut rappeler que Rocancourt était également mis en cause dans une autre affaire, dite "affaire Rocancourt", où il est soupçonné d'avoir tenté, contre paiement de faire régulariser des sans-papiers. C'est cette affaire qui a occasionné début février la mise en examen de Bernard Petit, chef de la PJ parisienne, et de son chef de cabinet, soupçonnés d'avoir renseigné un autre mis en cause dans cette affaire : Christian Prouteau, ex-chef du GIGN.

Le 11février 2015 Rocancourt a été assigné en résidence surveillée à Rouen. Entre-temps, les plongeurs de la police ont effectivement retrouvé le sac à dos de D.G. dans le lac de Créteil ... mais il était vide !

Et, en attendant, la question principale reste en suspens : que sont devenus les 52 kg de cocaïne volés au 36 du quai des orfèvres ?

A SUIVRE ...