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vendredi 21 octobre 2016

RÉCIT DE LA MORT DE JÉSUS-CHRIST

J'ai écrit et publié récemment, en (mauvais) espagnol, un récit de la mort de Jésus-Christ. Quelques (rares) ami(e)s m'ont demandé de publier ce texte en français. Dont acte !
Il s'agit d'un récit qui mêle divers extraits des quatre évangiles canoniques et des commentaires personnels.
  • Les textes bibliques figurent en caractère gras.
  • Mes commentaires personnels en italique.
Pour les textes bibliques, ma version de référence est la Bible de Louis Segond, contrairement à la version espagnole qui utilisait la bible de Jérusalem (la Bible de Louis Segond est d'inspiration protestante, donc peu connue en Espagne).

Le récit débute lors de l'arrestation de Jésus et se termine à sa mort.
C'est-à dire :

  • Mathieu XXVI, 47 – XXVII, 30
  • Marc XIV, 10 – XV, 37
  • Luc XXII, 47 – XXIII, 46
  • Jean XVIII, 1 – XIX, 30.

Source





La fête des pains sans levain, appelée la Pâque, approchait.
Les principaux sacrificateurs et les scribes cherchaient les moyens de faire mourir Jésus; car ils craignaient le peuple.
Or, Satan entra dans Judas, surnommé Iscariot, qui était du nombre des douze. Et Judas alla s'entendre avec les principaux sacrificateurs et les chefs des gardes, sur la manière de le leur livrer. Ils furent dans la joie, et ils convinrent de lui donner de l'argent. Après s'être engagé, il cherchait une occasion favorable pour leur livrer Jésus à l'insu de la foule.
(Luc XXII, 1-6)

Fuente

La Pâques est une fête très ancienne, qui a eu plusieurs significations dans l'histoire du peuple hébreux. Aujourd'hui, elle commémore la sortie d'Egypte sous la conduite de Moïse.
Mais le mot "Pâques" désigne aussi le repas traditionnel de cette journée. Jésus passa son dernier repas de Pâques dans la maison d'un homme dont les évangiles ne donnent pas le nom. C'est à l'occasion de cet ultime repas que Jésus a institué le rite chrétien de l'Eucharistie.

Les hommes que le texte de Luc désigne sous le nom de "sacrificateurs" constituaient pour le peuple juif le sommet de la hiérarchie sacerdotale. D'autres taductions les appellent "les grands prêtres". Luc parle aussi des "chefs des gardes". Cette traduction de Louis Segond est assez obscure. La Bible de Jérusalem les désigne sous le nom de "scribes", personnes savantes dont le jugement fait autorité en matière d'interprétation des textes saints.

Bien évidemment, quand Luc parle des "douze", il s'agit des douze apôtres : Simon (ultérieurement nommé Pierre ou Simon-Piere), son frère André, Jacques (fils de Cebade) et son frère Jean, Jacques (fils de Alfe), Philippe, Barthélémy, Thomas, Mathieu, Jude, Simon (dit "le Zélote) et Judas.
Les quatre apôtres les plus proches de Jésus semblent avoir été Pierre, André, Jacques fils de Cebade et Jean.
Dans l'évangile de Jean, on rencontre aussi le nom de Nathanaël mais les commentateurs pensent qu'il s'agit en fait de Barthélémy ou de Mathieu.

Lors de cet ultime repas, Jésus annonce qu'il sera renié par Pierre :

Le Seigneur dit: Simon, Simon, Satan vous a réclamés, pour vous cribler comme le froment. Mais j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point; et toi, quand tu seras converti, affermis tes frères. Seigneur, lui dit Pierre, je suis prêt à aller avec toi et en prison et à la mort. Et Jésus dit: Pierre, je te le dis, le coq ne chantera pas aujourd'hui que tu n'aies nié trois fois de me connaître. (Luc, XXII, 31-34)

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Jésus était en train de parler avec les apôtres quand arrivèrent les soldats qui vont l'arrêter.

Comme il parlait encore, voici, Judas, l'un des douze, arriva, et avec lui une foule nombreuse armée d'épées et de bâtons, envoyée par les principaux sacrificateurs et par les anciens du peuple. Celui qui le livrait leur avait donné ce signe: Celui que je baiserai, c'est lui; saisissez-le. Aussitôt, s'approchant de Jésus, il dit: Salut, Rabbi! Et il le baisa. Jésus lui dit: Mon ami, ce que tu es venu faire, fais-le. Alors ces gens s'avancèrent, mirent la main sur Jésus, et le saisirent.
Et voici, un de ceux qui étaient avec Jésus étendit la main, et tira son épée; il frappa le serviteur du souverain sacrificateur, et lui emporta l'oreille. Alors Jésus lui dit: Remets ton épée à sa place; car tous ceux qui prendront l'épée périront par l'épée. Penses-tu que je ne puisse pas invoquer mon Père, qui me donnerait à l'instant plus de douze légions d'anges?
Comment donc s'accompliraient les Écritures, d'après lesquelles il doit en être ainsi? En ce moment, Jésus dit à la foule: Vous êtes venus, comme après un brigand, avec des épées et des bâtons, pour vous emparer de moi. J'étais tous les jours assis parmi vous, enseignant dans le temple, et vous ne m'avez pas saisi. Mais tout cela est arrivé afin que les écrits des prophètes fussent accomplis. Alors tous les disciples l'abandonnèrent, et prirent la fuite. Ceux qui avaient saisi Jésus l'emmenèrent chez le souverain sacrificateur Caïphe, où les scribes et les anciens étaient assemblés.(Mathieu, XXVI,47-57)

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Caiphe était, en quelque sorte, le chef des prêtres et l'unique interlocuteur des romains depuis l'année 18. Mais il été aussi le gendre et le successeur de Anne, destitué par les romains au cours de l'année 15. Anne continuait toutefois de jouir d'un grand prestige et d'un grand pouvoir religieux après sa destitution. Les deux homes, Caïphe et Anne étaient totalement d'accord sur un point : il était nécessaire d'arrêter et d'exécuter Jésus pour des raisons tenant à son influence religieuse auprès des foules.

Selon l'évangile de Jean, il y eut en fait deux comparutions de Jésus devant le Sanhédrin (assemblée des prêtres) : la première dans la nuit quand on l'emmena auprés de Anne ; la seconde le matin suivant devant Caiphe.

Selon Jean l'entrevue avec Anne fut courte et violente.

Le souverain sacrificateur interrogea Jésus sur ses disciples et sur sa doctrine. Jésus lui répondit: J'ai parlé ouvertement au monde; j'ai toujours enseigné dans la synagogue et dans le temple, où tous les Juifs s'assemblent, et je n'ai rien dit en secret. Pourquoi m'interroges-tu? Interroge sur ce que je leur ai dit ceux qui m'ont entendu; voici, ceux-là savent ce que j'ai dit. A ces mots, un des huissiers, qui se trouvait là, donna un soufflet à Jésus, en disant: Est-ce ainsi que tu réponds au souverain sacrificateur? Jésus lui dit: Si j'ai mal parlé, fais voir ce que j'ai dit de mal; et si j'ai bien parlé, pourquoi me frappes-tu? Anne l'envoya lié à Caïphe, le souverain sacrificateur. 
(Jean XVIII, 19-24)

Ce qui suit a lieu tôt le matin. Les évangiles n'indiquent pas où Jésus a passé le reste de la nuit. 

Les principaux sacrificateurs et tout le sanhédrin cherchaient quelque faux témoignage contre Jésus, suffisant pour le faire mourir. Mais ils n'en trouvèrent point, quoique plusieurs faux témoins se fussent présentés. Enfin, il en vint deux, qui dirent:
Celui-ci a dit: Je puis détruire le temple de Dieu, et le rebâtir en trois jours. Le souverain sacrificateur se leva, et lui dit: Ne réponds-tu rien? Qu'est-ce que ces hommes déposent contre toi? Jésus garda le silence. Et le souverain sacrificateur, prenant la parole, lui dit: Je t'adjure, par le Dieu vivant, de nous dire si tu es le Christ, le Fils de Dieu. Jésus lui répondit: Tu l'as dit. De plus, je vous le déclare, vous verrez désormais le Fils de l'homme assis à la droite de la puissance de Dieu, et venant sur les nuées du ciel. Alors le souverain sacrificateur déchira ses vêtements, disant: Il a blasphémé! Qu'avons-nous encore besoin de témoins? Voici, vous venez d'entendre son blasphème. Que vous en semble? Ils répondirent: Il mérite la mort. Là-dessus, ils lui crachèrent au visage, et lui donnèrent des coups de poing et des soufflets en disant: Christ, prophétise; dis-nous qui t'a frappé.(Mathieu XXVI, 59-68)

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Dès que le matin fut venu, tous les principaux sacrificateurs et les anciens du peuple tinrent conseil contre Jésus, pour le faire mourir. Après l'avoir lié, ils l'emmenèrent, et le livrèrent à Ponce Pilate, le gouverneur. (Mathieu XXVII, 1-2)

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Ponce Pilate a été le cinquième gouverneur (préfet)de la province romaine de Judée pendant les années 26 à 36. Quand il reçoit Jésus, en cette année 784 du calendrier romain, il est gouverneur depuis sept ans de cette province dont la capitale était Cesarea Maritima, à 100 km de Jérusalem.Il y disposait d'nviron 3000 soldats. Pilate ne venait à Jérusalem qu'à l'occasion des fêtes religieuses et il y vivait dans un palais-forteresse construit par Hérode. Bien qu'étant, pour la majorité des chrétiens le symbole de la lâcheté, il est surprenant de constater que ce même Pilate, qui a tenu entre ses mais la vie et la mort du Christ, est considéré et vénéré comme un Saint par l'Églises chrétienne d'Éthiopie et par l' Église copte d'Égypte. En outre, quelques textes non canoniques parlent de sa mort comme d'une mort de martyr.

Alors Judas, qui l'avait livré, voyant qu'il était condamné, se repentit, et rapporta les trente pièces d'argent aux principaux sacrificateurs et aux anciens, en disant: J'ai péché, en livrant le sang innocent. Ils répondirent: Que nous importe? Cela te regarde. Judas jeta les pièces d'argent dans le temple, se retira, et alla se pendre. Les principaux sacrificateurs les ramassèrent, et dirent: Il n'est pas permis de les mettre dans le trésor sacré, puisque c'est le prix du sang. Et, après en avoir délibéré, ils achetèrent avec cet argent le champ du potier, pour la sépulture des étrangers. C'est pourquoi ce champ a été appelé champ du sang, jusqu'à ce jour. Alors s'accomplit ce qui avait été annoncé par Jérémie, le prophète: Ils ont pris les trente pièces d'argent, la valeur de celui qui a été estimé, qu'on a estimé de la part des enfants d'Israël; et il les ont données pour le champ du potier, comme le Seigneur me l'avait ordonné.(Mathieu XXVII, 3-10).

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Il existe une controverse à propos de la mort de Judas. L'évangile de Mathieu indique seulement "...et alla se pendre", alors que dans le Livre des Actes des Apôtres on lit : " Hommes frères, il fallait que s'accomplît ce que le Saint Esprit, dans l'Écriture, a annoncé d'avance, par la bouche de David, au sujet de Judas, qui a été le guide de ceux qui ont saisi Jésus. Il était compté parmi nous, et il avait part au même ministère. Cet homme, ayant acquis un champ avec le salaire du crime, est tombé, s'est rompu par le milieu du corps, et toutes ses entrailles se sont répandues. La chose a été si connue de tous les habitants de Jérusalem que ce champ a été appelé dans leur langue Hakeldama, c'est-à-dire, champ du sang." (Actes I, 17-18). Pour concilier ces deux textes, il a été suggéré que quand Judas s'est pendu, la corde s'est rompue, que son corps est tombé au sol et qu'il s'est éventré. Mais cette hypothèse semble peu plausible car il aurait fallu que Judas se pende par les pieds ! En fait cette incohérence entre les deux textes provient certainement des sources utilisées par Mathieu et Luc. Mathieu écrit pour un public juif et s'inspire de la mort d'Ajitofel (Samuel 2, 17-23) alors que Luc écrit pour des lecteurs d'origine païenne (des grecs) et s'inspire du Livre deuterocanonique Sabiduria . On y dit que Judas acheta le champ pour son propre compte.

Il faut noter que le Coran nie la crucifixion de Jésus (Sourate 4, 157-158) car l'Islam estime que Dieu n'aurait pas permis cette mort indigne sur la croix pour un prohète estimé comme l'est Jésus par les musulmans. L'Islam estime que les juifs ont fait crucifier quelqu'un qui ressemblait à Jésus, mais n'était pas Jésus, et qui aurait pu être ou Simon de Cirène, ou Judas.

Ils conduisirent Jésus de chez Caïphe au prétoire: c'était le matin. Ils n'entrèrent point eux-mêmes dans le prétoire, afin de ne pas se souiller, et de pouvoir manger la Pâque. Pilate sortit donc pour aller à eux, et il dit: Quelle accusation portez-vous contre cet homme? Ils lui répondirent: Si ce n'était pas un malfaiteur, nous ne te l'aurions pas livré. Sur quoi Pilate leur dit: Prenez-le vous-mêmes, et jugez-le selon votre loi. Les Juifs lui dirent: Il ne nous est pas permis de mettre personne à mort.
C'était afin que s'accomplît la parole que Jésus avait dite, lorsqu'il indiqua de quelle mort il devait mourir. Pilate rentra dans le prétoire, appela Jésus, et lui dit: Es-tu le roi des Juifs?
Jésus répondit: Est-ce de toi-même que tu dis cela, ou d'autres te l'ont-ils dit de moi? Pilate répondit: Moi, suis-je Juif? Ta nation et les principaux sacrificateurs t'ont livré à moi: qu'as-tu fait? Mon royaume n'est pas de ce monde, répondit Jésus. Si mon royaume était de ce monde, mes serviteurs auraient combattu pour moi afin que je ne fusse pas livré aux Juifs; mais maintenant mon royaume n'est point d'ici-bas. Pilate lui dit: Tu es donc roi? Jésus répondit: Tu le dis, je suis roi. Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. Quiconque est de la vérité écoute ma voix. Pilate lui dit: Qu'est-ce que la vérité? Après avoir dit cela, il sortit de nouveau pour aller vers les Juifs, et il leur dit: Je ne trouve aucun crime en lui.. (Jean, XVIII, 28-38)

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Il est vraisemblable que la phrase de Jean :" C'était afin que s'accomplît la parole que Jésus avait dite, lorsqu'il indiqua de quelle mort il devait mourir" se réfère au même évangile (Jean, XVIII, 16-21) où on lit :" Car Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle. Dieu, en effet, n'a pas envoyé son Fils dans le monde pour qu'il juge le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui. Celui qui croit en lui n'est point jugé; mais celui qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu'il n'a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. Et ce jugement c'est que, la lumière étant venue dans le monde, les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs oeuvres étaient mauvaises. Car quiconque fait le mal hait la lumière, et ne vient point à la lumière, de peur que ses oeuvres ne soient dévoilées; mais celui qui agit selon la vérité vient à la lumière, afin que ses oeuvres soient manifestées, parce qu'elles sont faites en Dieu".

Il faut noter la phrase de Pilate : "Qu'est-ce que la vérité ?". J'ai lu certains commentaires qui ne me paraissent pas corrects au sujet de cette question que Pilate se pose à lui-même. Je ne pense pas qu'il s'agisse de savoir si les accusations portées par les juifs à propos de Jésus étaient vraies ou non. C'est une réflexion beaucoup plus générale et profonde en réponse à ce que vient de dire Jésus : "mais celui qui agit selon la vérité vient à la lumière...". L'image que donne ainsi Pilate est éloignée de la caricature populaire. Il n'est pas seulement un homme qui se soumet docilement à la volonté générale, mais également un homme qui s'interroge sur le sens de la vie.
Ceci dit les évangiles montrent clairement que Pilate estimait que Jésus était absolument innocent.
Il va toutefois tenter, sans succès, de se débarasser de ce cas difficile en s'appuyant su une question de compétence de juridiction.

Quand Pilate entendit parler de la Galilée, il demanda si cet homme était Galiléen; et, ayant appris qu'il était de la juridiction d'Hérode, il le renvoya à Hérode, qui se trouvait aussi à Jérusalem en ces jours-là. Lorsque Hérode vit Jésus, il en eut une grande joie; car depuis longtemps, il désirait le voir, à cause de ce qu'il avait entendu dire de lui, et il espérait qu'il le verrait faire quelque miracle. Il lui adressa beaucoup de questions; mais Jésus ne lui répondit rien. Les principaux sacrificateurs et les scribes étaient là, et l'accusaient avec violence. Hérode, avec ses gardes, le traita avec mépris; et, après s'être moqué de lui et l'avoir revêtu d'un habit éclatant, il le renvoya à Pilate. Ce jour même, Pilate et Hérode devinrent amis, d'ennemis qu'ils étaient auparavant.(Luc, XXIII- 6-12)

Pilate va maintenant tenter de sauver Jésus en s'appuyant sur une coutume politique.

A chaque fête, le gouverneur avait coutume de relâcher un prisonnier, celui que demandait la foule. Ils avaient alors un prisonnier fameux, nommé Barabbas. Comme ils étaient assemblés, Pilate leur dit: Lequel voulez-vous que je vous relâche, Barabbas, ou Jésus, qu'on appelle Christ? Car il savait que c'était par envie qu'ils avaient livré Jésus. Pendant qu'il était assis sur le tribunal, sa femme lui fit dire: Qu'il n'y ait rien entre toi et ce juste; car aujourd'hui j'ai beaucoup souffert en songe à cause de lui. Les principaux sacrificateurs et les anciens persuadèrent à la foule de demander Barabbas, et de faire périr Jésus. Le gouverneur prenant la parole, leur dit: Lequel des deux voulez-vous que je vous relâche? Ils répondirent: Barabbas. Pilate leur dit: Que ferai-je donc de Jésus, qu'on appelle Christ? Tous répondirent: Qu'il soit crucifié! Le gouverneur dit: Mais quel mal a-t-il fait? Et ils crièrent encore plus fort: Qu'il soit crucifié! Pilate, voyant qu'il ne gagnait rien, mais que le tumulte augmentait, prit de l'eau, se lava les mains en présence de la foule, et dit: Je suis innocent du sang de ce juste. Cela vous regarde. Et tout le peuple répondit: Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants! Alors Pilate leur relâcha Barabbas; et, après avoir fait battre de verges Jésus, il le livra pour être crucifié. Les soldats du gouverneur conduisirent Jésus dans le prétoire, et ils assemblèrent autour de lui toute la cohorte. Ils lui ôtèrent ses vêtements, et le couvrirent d'un manteau écarlate. Ils tressèrent une couronne d'épines, qu'ils posèrent sur sa tête, et ils lui mirent un roseau dans la main droite; puis, s'agenouillant devant lui, ils le raillaient, en disant: Salut, roi des Juifs! Et ils crachaient contre lui, prenaient le roseau, et frappaient sur sa tête. Après s'être ainsi moqués de lui, ils lui ôtèrent le manteau, lui remirent ses vêtements, et l'emmenèrent pour le crucifier.
(Mathieu XXVII, 15-30)

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Mathieu indique que Barabas était "un prisonnier fameux". Marc et Luc donnent d'avantage de précisions : Barabas était condamné pour mutinerie et assassinat. On ne sait rien de plus sur Barabas. C'est un nom très courant puisqu'il signifie "fils du père" et peut donc s'appliquer à n'importe qui.
J'ai à ce sujet une opinion très personnelle. Il ne me semble pas fortuit qu'il y ait une similitude linguistique entre Barrabas " Fils du père" et Jésus "Fils du Père, c'est-à-dire de Dieu". C'est peut-être pour cette raison que certains manuscrits tardifs appèlent Barabas " Jésus Barrabas". Il faut noter, bien que ça n'ait aucune importance fondamentale, que dans ce cas la phrase de Pilate aurait eu une élégance particulière :" Qui voulez-vous que je relâche : Jésus Barrabas ou Jésus Christ ?".

Dans le texte de Mathieu cité plus haut, apparaît la femme de Pilate. C'est inhabituel car, en général, les femmes des gouverneurs restaient à Rome quand leur mari était dans sa province. Les évangiles n'indiquent pas le nom de cette femme, mais il est vraisemblable qu'il s'agisse de Claudia Procula, qui est vénérée comme une sainte par l'Église orthodoxe grecque et en Ethiopie (comme son mari, nous l'avons dit plus haut).

La crucifixion était une méthode ancienne et traditionnelle d'exécution chez les romains. Le prisonnier était attaché ou cloué sur une croix de bois, ou entre deux arbres ou contre un mur. Il était dénudé et laissé ainsi jusqu'à ce que la mort survienne. La méthode a été amplement utilisée à Rome (jusqu'en 337) et chez des peuples voisins. Elle exposait le condamné à une mort publique particulièrement  lente et cruelle, à titre dissuasif. Après la révolte des esclaves menée par Spartacus, 6000 esclaves ont été crucifiés.
Dans certains cas le condamné était préalablement flagellé. Pendant le parcours jusqu'au lieu de crucifixion il était contraint à porter une lourde poutre de bois (patibulum) sur ses épaules, poutre ensuite utilisée comme branche transversale de la croix.


Il faut en outre noter le point sivant : on entend souvent dire que le peuple juif est un peuple déicide car il a mis à mort le Fils de Dieu. Pourtant les évangiles indiquent clairement que la mort de Jésus a été l'oeuvre des Grands Prêtres et des scribes, pour des motifs politico-religieux destinés à maintenir et affermir leur pouvoir.. Le qualificatif "déicide" est ouvertement antisémite (ne pas confondre antisémitisme et la notion moderne d'antsionisme).

Al salir, encontraron a un hombre de Cirene llamado Simón, y le obligaron a llevar su cruz. (Mathieu XXVII, 32)


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Simon de Cirène est cité dans une des plus tristes chansons de Georges Brassens, composée de diverses strophes d'un long poème de Francis Jammes. Je ne résiste pas à l'envie de citer cette merveille de la chanson française :

"Par le petit garçon qui meurt près de sa mère
Tandis que des enfants s'amusent au parterre
Et par l'oiseau blessé qui ne sait pas comment
Son aile tout à coup s'ensanglante et descend
Par la soif et la faim et le délire ardent
Je vous salue, Marie.
Par les gosses battus, par l'ivrogne qui rentre
Par l'âne qui reçoit des coups de pied au ventre
Et par l'humiliation de l'innocent châtié
Par la vierge vendue qu'on a déshabillée
Par le fils dont la mère a été insultée
Je vous salue, Marie.
Par la vieille qui, trébuchant sous trop de poids
S'écrie : « Mon Dieu ! » par le malheureux dont les bras
Ne purent s'appuyer sur une amour humaine
Comme la Croix du Fils sur Simon de Cyrène
Par le cheval tombé sous le chariot qu'il traîne
Je vous salue, Marie.
Par les quatre horizons qui crucifient le monde
Par tous ceux dont la chair se déchire ou succombe
Par ceux qui sont sans pieds, par ceux qui sont sans mains
Par le malade que l'on opère et qui geint
Et par le juste mis au rang des assassins
Je vous salue, Marie.
Par la mère apprenant que son fils est guéri
Par l'oiseau rappelant l'oiseau tombé du nid
Par l'herbe qui a soif et recueille l'ondée
Par le baiser perdu par l'amour redonné
Et par le mendiant retrouvant sa monnaie
Je vous salue Marie"

Arrivés au lieu nommé Golgotha, ce qui signifie lieu du crâne, ils lui donnèrent à boire du vin mêlé de fiel; mais, quand il l'eut goûté, il ne voulut pas boire.(Mathieu XXVII, 33-34)

Golgotha est une petite colline dont le sommet est couronné par un monticule pierreux ressemblant à un crâne. D'où son nom latin "Calvae" que le français a transformé en "calvaire".

Le vin mêlé de fiel que Jésus refusa de boire était certainement utilisé comme narcotique pour atténuer les douleurs des condamnés. Il est peu probable qu'il ait été proposé par les soldats romains, mais plus certainement par une personne compatissante accompagnant Jésus. Luc (XV, 23) ne parle pas de fiel mais de myrrhe. Il s'agit d'une résine aromatique de couleur jaune, extraite d'un arbre dont le nom savant est "Commiphora myrrha". Il faut noter qu'il devait s'agir d'une substance relativement précieuse puisque Mathieu indique (XV,23) que c'est un des présents offerts par les Rois Mages à Jésus.

La couronne d'épines de Jésus est devenue un symbole de la foi chrétienne, bien que, d'un point de vue historique, on ne sait pas vraiment si elle a été posée sur la tête de Jésus. Il peut s'agir d'un détail ajouté pour souligner le mépris des soldats romains, hommage grotesque à celui qu'il nommaient "roi des juifs".
On ne sait pas non plus si Jésus portait cette couronne lorsqu'il était sur la croix. En fait, la tradition iconographique initiale ne représente pas Jésus en croix portant la couronne. Ce n'est qu'à partir du treizième siècle qu'elle apparaît dans les oeuvres d'art.
Peu après la mise à sac de Constantinople, en 1238, la couronne, conservée comme relique, a été vendue à un marchand de Venise, puis rachetée par le roi Saint-Louis. Elle entra à Paris le 18 novembre 1239 et fut provisoirement conservée dans la cathédrale Notre-Dame. En 1248 elle a été transférée dans une chapelle spécialement construite à cet effet : la sainte-Chapelle" sur l'île Saint-Louis.
Pendant la Révolution, elle a été considérée comme faisant partie du patrimoine national et conservée au Cabinet des Médailles. En 1801 elle a été remise à l'archevêque de Paris qui l'a conservée dans le Trésor de Notre-Dame. Napoléon I, puis Napoléon III  ont offert ultérieurement deux reliquaires pour la conserver. Un dernier reliquaire (le reliquaire actuel) a été dessiné par l'architecte Jules Astruc, et réalisé par Maurice Poussielgue-Rusand.
Généralement, et pour des raisons qui m'échappent, la Sainte Couronne n'est pas exposée au public. Elle ne l'est que le premier vendredi de chaque mois, le vendredi du Carême et le Vendredi Saint.



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Ils le crucifièrent, et se partagèrent ses vêtements, en tirant au sort pour savoir ce que chacun aurait. C'était la troisième heure, quand ils le crucifièrent. L'inscription indiquant le sujet de sa condamnation portait ces mots: Le roi des Juifs. Ils crucifièrent avec lui deux brigands, l'un à sa droite, et l'autre à sa gauche. Ainsi fut accompli ce que dit l'Écriture: Il a été mis au nombre des malfaiteurs. Les passants l'injuriaient, et secouaient la tête, en disant: Hé! toi qui détruis le temple, et qui le rebâtis en trois jours, sauve-toi toi-même, en descendant de la croix! Les principaux sacrificateurs aussi, avec les scribes, se moquaient entre eux, et disaient: Il a sauvé les autres, et il ne peut se sauver lui-même! Que le Christ, le roi d'Israël, descende maintenant de la croix, afin que nous voyions et que nous croyions! Ceux qui étaient crucifiés avec lui l'insultaient aussi.. (Marcos XV, 24-32)


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La troisième heure peut désigner 9h du matin ou la totalité de la période entre 9h et midi. Dans ce cas il s'agit de 9h du matin.

Le fait de mettre une inscription sur la croix n'est pas spécifique à Jésus. Il s'agissait d'indiquer aux passants le motif de la condamnation. Jean donne à ce sujet quelques indications complémentaires : "Pilate fit une inscription, qu'il plaça sur la croix, et qui était ainsi conçue: Jésus de Nazareth, roi des Juifs. Beaucoup de Juifs lurent cette inscription, parce que le lieu où Jésus fut crucifié était près de la ville : elle était en hébreu, en grec et en latin. Les principaux sacrificateurs des Juifs dirent à Pilate: N'écris pas: Roi des Juifs. Mais écris qu'il a dit: Je suis roi des Juifs. Pilate répondit: Ce que j'ai écrit, je l'ai écrit."(Jean XIX, 19-22).

Les soldats, après avoir crucifié Jésus, prirent ses vêtements, et ils en firent quatre parts, une part pour chaque soldat. Ils prirent aussi sa tunique, qui était sans couture, d'un seul tissu depuis le haut jusqu'en bas. Et ils dirent entre eux : ne la déchirons pas, mais tirons au sort à qui elle sera. Cela arriva afin que s'accomplît cette parole de l'Écriture: Ils se sont partagé mes vêtements, Et ils ont tiré au sort ma tunique. Voilà ce que firent les soldats.(Juan XIX, 23-24)

La référérence de Jean est le Livre des Psaumes XXII, 19.

Commence alors l'agonie de Jésus. Les quatre évangiles canoniques citent ce que l'on a coutume d'appeler "Les sept paroles du Christ sur la croix", c'est-à-dire les dernières paroles du Christ :

1. "Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils font" (Luc, XXIII, 34).
2. "Je te le dis en vérité, aujourd'hui tu seras avec moi dans le paradis." (Luc, XXIII, 43).
3. "Femme, voilà ton fils [...]Voilà ta mère." (Jean, XIX, 26-27).
4. "Mon Dieu, mon Dieu, Pourquoi m'as-tu abandonné ?" (Mathieu, XXVII, 46 et Marc, XV, 34).
5. "J'ai soif." (Jean, XIX, 28).
6. "Tout est accompli." (Jean, XIX, 30).
7. "Père, je remets mon esprit entre tes mains." (Luc, XXIII, 46).

La première parole  a été prononcée par Jésus crucifié, avant que les soldats ne se répartissent ses vêtements. On ne comprend pas très bien, me semble-t-il, si cette parole a pour objet les soldats romains ou les prêtres et scribes juifs. Mais elle peut aussi avoir une portée beaucoup plus générale si on la relie au dialogue avec Pierre dans Mathieu XVIII, 21-22 :"Alors Pierre s'approcha de lui, et dit: Seigneur, combien de fois pardonnerai-je à mon frère, lorsqu'il péchera contre moi? Sera-ce jusqu'à sept fois? Jésus lui dit: Je ne te dis pas jusqu'à sept fois, mais jusqu'à septante fois sept fois".

La deuxième parole du Christ est la conclusion d'un dialogue avec un des bandits crucifiés en même temps que le Christ (Luc XXIII, 39-42) :"L'un des malfaiteurs crucifiés l'injuriait, disant: N'es-tu pas le Christ? Sauve-toi toi-même, et sauve-nous! Mais l'autre le reprenait, et disait: Ne crains-tu pas Dieu, toi qui subis la même condamnation? Pour nous, c'est justice, car nous recevons ce qu'ont mérité nos crimes; mais celui-ci n'a rien fait de mal. Et il dit à Jésus: Souviens-toi de moi, quand tu viendras dans ton règne. Jésus lui répondit: Je te le dis en vérité, aujourd'hui tu seras avec moi dans le paradis". Ce dialogue me semble être un des plus émouvants des évangiles. Il les résume en quelque sorte.
Dans certaines traductions j'ai lu une tournure qui, d'un point de vue littéraire me semble meilleure : " je te le dis en vérité, tu seras aujourd'hui à mon côté à la table du Père" (je cite de mémoire).

La troisième parole est adressée par Jésus à sa mère Marie et à son disciple préféré Jean : " Près de la croix de Jésus se tenaient sa mère et la soeur de sa mère, Marie, femme de Clopas, et Marie de Magdala. Jésus, voyant sa mère, et auprès d'elle le disciple qu'il aimait, dit à sa mère: Femme, voilà ton fils. Puis il dit au disciple: Voilà ta mère. Et, dès ce moment, le disciple la prit chez lui". (Jean XIX, 25-27)

La quatrième parole du Christ en croix, authentifié par Mathieu et Pierre peut être interprétée de diverses manières. Elle est également connue sous sa forme araméenne :"Eli! Eli! Lama sabachtani ?". (cf un article à ce sujet dans mon blog). On peut la lire comme celle d'un homme qui souffre et doute. Cette interprétation n'est pas sans fondement puisque Jésus, la nuit de son arrestation a ressenti de la tristesse et de l'angoisse, comme on peut le lire dans Mathieu XXVI, 37-29 :"Là-dessus, Jésus alla avec eux dans un lieu appelé Gethsémané, et il dit aux disciples: Asseyez-vous ici, pendant que je m'éloignerai pour prier. Il prit avec lui Pierre et les deux fils de Zébédée, et il commença à éprouver de la tristesse et des angoisses. Il leur dit alors: Mon âme est triste jusqu'à la mort; restez ici, et veillez avec moi. Puis, ayant fait quelques pas en avant, il se jeta sur sa face, et pria ainsi: Mon Père, s'il est possible, que cette coupe s'éloigne de moi! Toutefois, non pas ce que je veux, mais ce que tu veux".
Mais on peut comprendre aussi, plus simplement, que Jésus récite les premiers versets du Psaume XXII qui n'est pas uniquement un psaume d'angoisse et de tristesse, mais aussi, dans ses dernières lignes un psaume d'espérance.

La cinquième parole du Christ "J'ai soif" n'est citée que par Jean XIX, 28 :"Après cela, Jésus, qui savait que tout était déjà consommé, dit, afin que l'Écriture fût accomplie: J'ai soif. Il y avait là un vase plein de vinaigre. Les soldats en remplirent une éponge, et, l'ayant fixée à une branche d'hysope, ils l'approchèrent de sa bouche".
Il s'agit là d'une référence directe de Jean au Psaume LIXX, 22.

La sixième parole du Christ "Tout est accompli" est la dernière parole du Christ avant sa mort dans l'évangile de Jean XIX, 30 : "Quand Jésus eut pris le vinaigre, il dit: Tout est accompli. Et, baissant la tête, il rendit l'esprit". À mon sens, Jésus annonce ainsi la fin et le renouvellement de l'alliance de l'Ancien Testament. Il est clair que c'est là que se situe le point de clivage essentiel entre juifs et chrétiens.

La septième parole du Christ est citée par Luc (XXIII, 44-46) et fait référence au Psaume XXXI, 6 :"Il était déjà environ la sixième heure, et il y eut des ténèbres sur toute la terre, jusqu'à la neuvième heure. Le soleil s'obscurcit, et le voile du temple se déchira par le milieu. Jésus s'écria d'une voix forte: Père, je remets mon esprit entre tes mains. Et, en disant ces paroles, il expira".

 





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