N'étant pas historien je n'ai pas la prétention de fournir ici un récit détaillé de la bataille de Stalingrad ; ni celle d'analyser les stratégies mises en oeuvre, car je ne suis pas militaire. D'excellents ouvrages ont été écrits sur le sujet et des vidéos bien documentées sont disponibles. Je me contenterai ici de souligner quelques aspects significatifs. Sur le fond du sujet, mon propos est de donner la vision de quelqu'un qui est né après la guerre, une génération pour qui le mot "Stalingrad" évoquait encore le symbole d'une des plus sanglantes et longues batailles de l'Histoire, un coup d'arrêt décisif porté à l'hégémonie militaire du Reich. Pourquoi évoquer ce symbole ? Parce que j'ai le sentiment (je m'en expliquerai plus loin) qu'il n'en est plus un, hormis dans un cercle très restreint qui est essentiellement celui des historiens.
Il y a, à mon avis, un oubli de ce qu'a signifié la bataille de Stalingrad et il me semble que cet oubli est lié à deux facteurs principaux.
Le premier est que le nom de Staline est irrémédiablement lié aux atrocités de sa dictature. Pour les états démocratiques (ou qui se prétendent tels), Staline est un repoussoir. C'est totalement légitime. Des millions de morts, de déportés, de condamnés au mépris de la plus élémentaire conception de ce que devrait être un état de droit, avec en toile de fond, un culte bien organisé au "Petit père des peuples".
Lénine d'ailleurs en a été conscient. Dans un post-scriptum de son testament (4 janvier 1923) il écrit : " Staline est trop brutal, et ce défaut parfaitement tolérable dans notre milieu et dans les relations entre nous, communistes, ne l’est pas dans les fonctions de secrétaire général. Je propose donc aux camarades d’étudier un moyen pour démettre Staline de ce poste et pour nommer à sa place une autre personne qui n’aurait en toutes choses sur le camarade Staline qu’un seul avantage, celui d’être plus tolérant, plus loyal, plus poli et plus attentif envers les camarades, d’humeur moins capricieuse, etc."
Une religion laïque ? |
Lénine d'ailleurs en a été conscient. Dans un post-scriptum de son testament (4 janvier 1923) il écrit : " Staline est trop brutal, et ce défaut parfaitement tolérable dans notre milieu et dans les relations entre nous, communistes, ne l’est pas dans les fonctions de secrétaire général. Je propose donc aux camarades d’étudier un moyen pour démettre Staline de ce poste et pour nommer à sa place une autre personne qui n’aurait en toutes choses sur le camarade Staline qu’un seul avantage, celui d’être plus tolérant, plus loyal, plus poli et plus attentif envers les camarades, d’humeur moins capricieuse, etc."
La deuxième raison, qui me semble prégnante dans l'oubli de Stalingrad, est l'attribution de la victoire finale contre le nazisme aux soldats américains. Une enquête qui figure sur le site "http://www.slate.fr/story/88935/defaite-nazis-sondage", indique que, en 1944, 61% des sondés pensaient que le principal acteur de la victoire était l'URSS. En 2004, 58% pensent que ce sont les USA. Entre 1944 et 2004 le vent de l'Histoire a soufflé, avec des rafales qui sont : la révélation des crimes de Staline, la Hongrie et la Tchécoslovaquie, la crise de Cuba, etc.
La bataille de Stalingrad a duré du 17 juillet 1942 au 2 février 1943. La date du 17 juillet 1942 est celle du début de l'avancée de la Wehrmacht vers la ville, soit le début de l'occupation de la boucle du Don. Celle du 2 février 1943 est celle de l'orde de reddition qu'a donné Paulus à ses troupes. La bataille aura donc duré 6 mois! Six mois avec, dans les moments les plus dramatiques et les plus sanglants, des conditions hivernales draconiennes aussi bien pour les Allemands que pour les Soviétiques. Peut-être plus pour les Allemands qui étaient moins bien équipés, n'avaient pas tiré toutes les leçons de la débâcle hivernale de Napoléon et avaient sous-estimé la résistance du peuple russe et de ses soldats. "En dix jours nous liquiderons Stalingrad" avait dit Paulus (citation approximative et de mémoire). Il ne réussira jamais à occuper totalement et définitivement la ville.
Il est vrai que le choix de Paulus pour commander l'offensive sur Stalingrad n'a pas été une initiative heureuse pour le Reich. Paulus était un général doté de toutes les qualités nécessaires à un officier d'état-major, mais qui n'avait jamais eu l'expérience du commandement d'une grande armée (la VI° armée) en temps de guerre. Il sera fait prisonnier pendant 11 ans après sa reddition à Stalingrad, puis s'installera à Dresde en RDA. Son activité et ses prises de position, après la guerre, laissent penser penser qu'il n'était pas un partisan convaincu du national-socialisme.
Côté soviétique, la défense de Stalingrad est confiée à un général expérimenté, dont la formation n'a rien à envier à celle de Paulus : Vassili Ivanovitch Chouïkov.
Chouikov, issu d'une famille de paysans, était un général formé à la renommée Académie militaire Frounzé, énergique, capable de décisions rapides, toujours brillant dans ses actions de commandement militaire. Après sa résistance à Stalingrad il reçoit le titre de "Héros de l'Union Soviétique" et commande l'armée qui prendra Berlin (dont il recevra lui-même la reddition). Il recevra le titre de maréchal en 1946, aura de très hautes responsabilités et restera toujours fidèle au régime communiste.
Beaucoup de choses séparent Paulus et Chouikov. Beaucoup de choses les rapprochent aussi. Ce qui les séparent c'est d'abord la conviction idéologique : mitigée chez Paulus ; totale chez Chouikov. Ce sont aussi deux psychologies différentes : un stratège allemand prudent et parfois hésitant (hésitations qui expliquent peut-être que, après avoir refusé les propositions de reddition honorables des Soviétiques, il se soit finalement rendu sans chercher à provoquer une apocalypse finale) ; en face un tacticien soviétique réaliste et prompt à la décision qui obéit à lettre aux directives de Staline (tenir coûte que coûte) et à ses propres convictions. Ce qui les rapprochent c'est d'avoir tous les deux vécus dans un enfer, physiquement exposés, un enfer où ils ont vu l'armée dont ils avaient la charge progressivement décimée.
En son temps (qui n'est pas le nôtre) la bataille de Stalingrad a eu un impact considérable. Elle a montré à l'opinion publique occidentale que l'armée allemande pouvait être vaincue et a marqué un tournant dans la conduite de la guerre, un regain d'optimisme ; elle a galvanisé le peuple russe en lui montrant les potentialités que possédait son armée, héroïque, compétente et disciplinée. Aux dires des témoins elle a fortement déstabilisé Hitler et, par conséquent le peuple allemand.
Il reste toutefois des torrents de sang sur cette terre baignée par le Don et par la Volga. Des centaines de milliers de cadavres, toutes nationalités confondues (allemands, roumains, russes, ...), presque un million pour la totalité du front de l'Est. Un million d'êtres parmi lesquels "des Mozart qu'on a assassinés", des poètes, des ouvriers, des agriculteurs, des scientifiques ... et des anonymes dont le vent a emporté la poussière et le nom. RIP.
La bataille de Stalingrad a duré du 17 juillet 1942 au 2 février 1943. La date du 17 juillet 1942 est celle du début de l'avancée de la Wehrmacht vers la ville, soit le début de l'occupation de la boucle du Don. Celle du 2 février 1943 est celle de l'orde de reddition qu'a donné Paulus à ses troupes. La bataille aura donc duré 6 mois! Six mois avec, dans les moments les plus dramatiques et les plus sanglants, des conditions hivernales draconiennes aussi bien pour les Allemands que pour les Soviétiques. Peut-être plus pour les Allemands qui étaient moins bien équipés, n'avaient pas tiré toutes les leçons de la débâcle hivernale de Napoléon et avaient sous-estimé la résistance du peuple russe et de ses soldats. "En dix jours nous liquiderons Stalingrad" avait dit Paulus (citation approximative et de mémoire). Il ne réussira jamais à occuper totalement et définitivement la ville.
Général Paulus |
Côté soviétique, la défense de Stalingrad est confiée à un général expérimenté, dont la formation n'a rien à envier à celle de Paulus : Vassili Ivanovitch Chouïkov.
Général Tchouikov |
Beaucoup de choses séparent Paulus et Chouikov. Beaucoup de choses les rapprochent aussi. Ce qui les séparent c'est d'abord la conviction idéologique : mitigée chez Paulus ; totale chez Chouikov. Ce sont aussi deux psychologies différentes : un stratège allemand prudent et parfois hésitant (hésitations qui expliquent peut-être que, après avoir refusé les propositions de reddition honorables des Soviétiques, il se soit finalement rendu sans chercher à provoquer une apocalypse finale) ; en face un tacticien soviétique réaliste et prompt à la décision qui obéit à lettre aux directives de Staline (tenir coûte que coûte) et à ses propres convictions. Ce qui les rapprochent c'est d'avoir tous les deux vécus dans un enfer, physiquement exposés, un enfer où ils ont vu l'armée dont ils avaient la charge progressivement décimée.
En son temps (qui n'est pas le nôtre) la bataille de Stalingrad a eu un impact considérable. Elle a montré à l'opinion publique occidentale que l'armée allemande pouvait être vaincue et a marqué un tournant dans la conduite de la guerre, un regain d'optimisme ; elle a galvanisé le peuple russe en lui montrant les potentialités que possédait son armée, héroïque, compétente et disciplinée. Aux dires des témoins elle a fortement déstabilisé Hitler et, par conséquent le peuple allemand.
Il reste toutefois des torrents de sang sur cette terre baignée par le Don et par la Volga. Des centaines de milliers de cadavres, toutes nationalités confondues (allemands, roumains, russes, ...), presque un million pour la totalité du front de l'Est. Un million d'êtres parmi lesquels "des Mozart qu'on a assassinés", des poètes, des ouvriers, des agriculteurs, des scientifiques ... et des anonymes dont le vent a emporté la poussière et le nom. RIP.
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