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dimanche 18 septembre 2016

Á PROPOS DE L'ANXIÉTÉ PATHOLOGIQUE

Dans un précédent article (cf. ici), j’ai évoqué une pathologie morbide : la dépression profonde.  J’aborde ici la question de l’anxiété.

Il me semble toutefois nécessaire de répéter :

  • Que je ne cherche pas, dans ces deux articles,  à raconter certains épisodes de ma vie (sur lesquels d’ailleurs je ne donne aucun détail) mais à analyser aussi rationnellement qu’il est possible des états pathologiques que j’ai vécu ou que je vis encore.
  • Que je ne suis ni psychiatre, ni psychologue, ni psychanalyste et que je me borne donc à décrire sans analyser en profondeur.



L’anxiété est un phénomène qui, pour moi, est assez récent. Il me semble que lorsque j’étais dans un état de dépression profonde, je n’étais pas anxieux. Mais peut-être la profondeur de la dépression m’a-t-elle caché cet état qui, pendant cette période, était sous-jacent. Ou, plus justement sans doute, l’anxiété n’avait pas lieu d’être. En effet, comme je le dirai plus bas, l’anxiété se traduit essentiellement par le doute et la crainte de l’avenir. Or, dans une phase de dépression profonde, on  n’a pas ce sentiment, précisément car on ne pense pas avoir d’avenir.
Je parlerai ici d’anxiété pathologique (les spécialistes disposent sans doute d’autres termes) car l’anxiété peut se situer dans un champ non pathologique, en quelque sorte « normal ». Si par exemple un de mes proches, ou moi-même, attend les résultats d’un examen médical susceptible de révéler une maladie grave, l’anxiété est parfaitement justifiée.
Si par contre cette anxiété n’a pas de fondement tangible, concret, on peut parler de pathologie.

Cette pathologie se traduit essentiellement par le doute et la crainte.


  • Le doute : toutes les situations heureuses, ou simplement les situations faisant partie de la vie quotidienne semblent mises en question. Le questionnement, dans ce type d’anxiété, est une caractéristique majeure. Consciemment ou inconsciemment, on analyse tout. Avec toujours des conclusions négatives ou, au minimum, dubitatives. On se pose des questions qui, raisonnablement n’ont pas lieu d’être. On est en quelque sorte, mais pour de toutes autres raisons, dans le doute métaphysique et, en quelque sorte pédagogique de Descartes. Mais Descartes n’était pas anxieux. Il était, pourrait-on dire, « curieux ». Lors des phases d’anxiété pathologique, ce n’est pas la recherche du savoir qui importe. Les questions surgissent de manière spontanée (de mauvaises questions, dans tout les sens du terme) d’une manière quasi-masochiste. Tout se passe comme si on ne voulait pas être heureux. Le questionnement et le doute ne sont en fait que des prétextes pour refuser la tranquillité sereine. Pourquoi ? Parce que, me semble-t-il, l’anxiété pathologique succède à une phase dépressive au cours de laquelle le maître-mot était la vacuité de l’existence. Lorsque cette phase très aiguë est surmontée, elle laisse quand même la trace de la potentialité d’événements graves ou malheureux et de la possibilité d’une vie au cours de laquelle « tout » peut arriver ».
  • La crainte : les conclusions du raisonnement, je l’ai dit plus haut, sont toujours négatives. Peu importe la rationalité des arguments, on arrive toujours à la conclusion que le pire va arriver ou a une forte probabilité d’arriver. La crainte, on pourrait même parler de peur, s’impose d’elle-même et sa fonction principale est paralysante. Par paralysie, j’entends non pas l’inaction physique, mais l’obsession mentale. On ne pense qu’à « ça » ! Á cet improbable qui est une véritable souffrance. On ne peut pas vivre dans la crainte.

Bien entendu, il y a toujours de « bonnes volontés » (je n’emploie pas l’expression dans son sens kantien), qui, pour les meilleures raisons du monde, indirectement ou directement, attisent ces craintes et ces doutes. Mais le discours des « autres » est le plus souvent qu’il faut jouir de l’instant et ne pas se soucier de l’avenir.

Or, indépendamment de toute pathologie, je suis totalement hermétique à ce type de discours. Je pense au contraire qu’il est toujours sain et raisonnable d’agir dans l’instant avec la perspective et la prévision d’un futur proche. Le contraire est inconséquent et contraire à tous principes éthiques.

Il est d’ailleurs curieux que les personnes qui tiennent ce type de discours, font souvent référence, à tort, à Épicure. Il s’agit d’une lecture totalement erronée de ce philosophe. En réalité, Épicure prône une philosophie d'équilibre. Il s'agit pour l'épicurien d'agir sobrement en recherchant les actions amenant l'absence de douleur. Le plaisir est le bien, et les vertus servent d'instruments. La vie selon le plaisir est une vie de prudence, de vertu et de justice. Fermons la parenthèse.
L’anxiété pathologique a, au moins en ce qui me concerne, deux effets concrets nuisibles :

Le premier est le manque d’appétit et de sommeil. Dans les phases les plus douloureuses, on a l’impression que tout le corps est noué ; en particulier tout l’appareil digestif, et il semble impossible d’ingérer une quelconque nourriture. Quant au sommeil, on ne l’obtient que grâce à des produits dits « anxiolytiques » qui, à mon avis, servent surtout de somnifères. En effet si le sommeil fait disparaître provisoirement l’anxiété, il ne la traite pas. Le repos de l’esprit qu’il procure n’est que provisoire et s’évanouit avec l’aube.
Je n’ai pas véritablement résolu ce problème, mais je suis optimiste. En effet lors d’épisodes heureux, il m’arrive de considérer avec lucidité, et même avec ironie, mes états d’anxiété. 

Ces moments sont rares. Il faut donc non pas les attendre, mais les chercher. Avoir confiance en soi, confiance dans les autres, et ne communiquer (sur ce sujet) qu'avec des personnes «sures ». 

En quelque sorte, il faut être épicurien dans le bon sens du terme.


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